Colloque international de Philosophie | 9 au 11 Avril, 2015, Paris
Par David le dimanche 18 janvier 2015, 18:31 - 2015 - Lien permanent
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L’ambition de ce colloque est d'éclairer une question essentielle pour saisir la pensée de Jean-François Lyotard et, symétriquement, d'apporter au développement actuel de la question du langage l'acuité et l'originalité de l'approche lyotardienne. La « pensée française » a été tardivement affectée par le tournant langagier de la philosophie allemande et anglo-saxonne du XXe siècle. L’écoute, lorsqu’elle existait, s’est trouvée minée par des polémiques qui perdurent. La pragmatique langagière, puis la philosophie des phrases élaborées par Jean-François Lyotard attestent qu’il est l’un des rares Français sensibles à ce bouleversement, qu’il a opéré un « pontage » entre deux traditions généralement opposées. Cela nous semble être l’un des lieux de son actualité et de sa fécondité. Son oeuvre propose ainsi une entrée possible dans les débats en cours et dessine les contours d’une voie alternative à approfondir.
Objet d’un travail et de remaniements constants, le langage est le fil conducteur le plus pertinent pour comprendre comment « la » rationalité polarise cette oeuvre. L’une des tâches serait de revenir sur la lecture que Lyotard propose des différentes théories du langage, celles de Wittgenstein, Russell ou Kripke, mais aussi – en-deçà du tournant langagier – celles de la linguistique ou de la sémiologie, très présentes dans des textes comme Rudiments païens ou Économie libidinale. À travers le changement des références mais aussi des concepts-clefs (« discours », « récit », « phrase », « idiome »), Lyotard entraîne le langage dans une multiplicité de déplacements conceptuels qui obligent à reconnaître la pluralité des formes de discours, des pratiques rationnelles, et à s’interroger sur leur puissance et leur valeur respectives. De la « terreur » que peut imposer tout genre de discours jusqu ‘à la résistance de ce qui ne peut pas se dire, en passant par la force de la « rétorsion » sophistique, Lyotard s’interroge sur le pouvoir d’occultation et le pouvoir critique des discours. Son débat avec Rorty, Habermas ou Appel sur le modèle « communicationnaliste » de la parole sensée aura focalisé l’attention parce qu’il engage explicitement le double enjeu épistémique et politique de toute conception du langage. Débat qu’on pourra prolonger en confrontant le concept post-habermasien de « reconnaissance » à celui, lyotardien, de « différend ».
On n’oubliera pourtant pas que cette œuvre, inaugurée par l’analyse du « figural » dans Discours, figure, ne s’achève pas avec Le Différend, mais avec une réflexion sur l’inarticulé, l’innommable, que sont la la donation sensible, le sentiment, la « phrase affect ». De cette dépossession « esthétique » sur laquelle bute le discours, l’écriture de Lyotard aura elle-même témoigné – ou plutôt les écritures, se déportant elles-mêmes en déplaçant leur objet.